{COVID19} des pistes de traitement à Strasbourg

Il s’agit d’un partenariat de cohortes et de tests qui d’ordinaire prendrait minimum 18 mois. Mais l’urgence sanitaire et le concours de toutes les spécialités médicales et paramédicales en ces […]

Il s’agit d’un partenariat de cohortes et de tests qui d’ordinaire prendrait minimum 18 mois. Mais l’urgence sanitaire et le concours de toutes les spécialités médicales et paramédicales en ces temps de crise ont permis à Strasbourg de s’associer avec les Hôpitaux de Paris pour tester un traitement anti-inflammatoire d’ordinaire utilisé pour les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde. Au total, plus de 400 personnes ont été mobilisés pour mettre en place un protocole de randomisation de cet essai thérapeutique. (ndlr : une randomisation est, dans un essai clinique thérapeutique, la façon « aléatoire » de lutter contre les biais de sélection des patients de l’étude en choisissant au hasard ou tirage au sort ces derniers pour les différents groupes tests).

Aux Hôpitaux Universitaires de Strasbourg,le Professeur Jacques-Eric Gottenberg, chef de service du service rhumatologie traite ses patients atteints de polyarthrite rhumathoïde avec un anti-inflammatoire appelé tocilizumab. La spécificité de ce traitement réside dans sa capacité à lutter contre l’emballement immunitaire et contre le fameux « orage de cytokine » qui détruit, lors des stades avancés de la maladie, les tissus humains, responsable de l’aggravation des cas allant jusqu’au décès.

Les cytokines, indispensable maillon du système immunitaire

Les cytokines sont des agents essentiels du système immunitaire. Nous en connaissons actuellement une cinquantaine, classés selon leurs fonctions, toutes visant à protéger le corps humains contre des agents pathogènes (= agressions internes comme des virus, bactéries, etc…). Les réactions inflammatoires, c’est-à-dire l’accumulation des cytokines qui activent le système immunitaire, sont indispensables aux réactions de défense, parce qu’elles attirent, sur le site agressé, les acteurs de la riposte. Toutefois, l’objectif ne doit pas être dépassé, au risque que la réaction ne devienne délétère et qu’elle n’entraîne des séquelles, telles des nécroses locales, voire globales. En général, cette surproduction de cytokines est équilibré par d’autres molécules, afin d’arriver à une balance qui permette de traiter les virus tout en préservant le corps.

Dans certaines situations pathologiques, le choc septique notamment, cet équilibre est rompu, les substances inflammatoires dont la cytokine,  diffusent dans tout l’organisme, ce qui explique la défaillance de nombreux organes (manque d’oxygénation, nécrose des tissus, défaillance sanguine..). En résumé, le corps s’emballe, et la réaction anti-inflammatoire de l’organisme face au COVID19 tue les organes. Il a été prouvé que beaucoup de patients atteints du COVID19 souffraient de cet « orage » et que les risques d’être placés en réanimation et d’arriver au décès étaient plus fortes.

Le tocilizumab, le traitement qui aide à réguler le système immunitaire

Cette molécule au nom un peu ingrat est un anticorps monoclonal, ce qui implique qu’il s’agit de molécules naturellement produites par le système immunitaire en vue de déclencher une attaque ciblée sur un danger déjà rencontré et donc d’accroître son efficacité. Il est fortement utilisé en oncologie et depuis une vingtaine d’années, les chercheurs sont lancés dans de nombreuses études pour le développement de ces dernières. Selon l’OMS, 496 anticorps thérapeutiques sont en cours d’évaluation, et plus de 80 sont déjà commercialisés au USA.

CORIMUNO-TOCI, plateforme d’essais cliniques regroupant 8 hôpitaux

Un consortium mené par l’Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) et les Hôpitaux Universaires de Strasbourg a permis de mener, en quelques semaines, une étude clinique randomisée, soutenu par le programme REACTing porté par l’Inserm. Le processus ici a imposé de suivre les étapes balisées et nécessaires allant de la déclaration des essais à leur mise en œuvre scientifiquement organisée. Les patients reçoivent une injection de tocilizumab dès leur arrivée à l’hôpital, après confirmation de leur pathologie. Les premiers résultats laissent apercevoir que les patients souffrant d’une pneumonie sévère à moyenne, sans passer par la réanimation, ont vu leur état s’améliorer significativement, la deuxième injection n’étant pas nécessaire vu l’efficacité de la première. L’injection de cette molécule revient à 1000 euros soit … le prix d’une nuit d’hospitalisation.

Au total, 129 patients ont été randomisés dont 64 avec traitement habituel + tocilizumab dont 23 à Strasbourg.

Prochaine étape : tester les patients en réanimation

Des tests sont en cours sur 32 patients en état de réanimation cette fois-ci à Strasbourg. Le Professeur Gottenberg travaille de concert avec le Professeur d’infectiologie des HUS, Yves Hansmann. Le niveau de preuves de l’étude est telle que dans l’urgence, des publications scientifiques ont été communiqués afin de « rendre éthique » cette voie de traitement pour tous les patients qui souhaiteraient en bénéficier. Dès lors les hôpitaux ont accès à un protocole de soin permettant de traiter les patients au stade moyen à avancé.

Bien entendu, les tests se poursuivent pour vérifier l’efficacité sur le long terme.

L’AP-HP, coordinateur du programme CORIMUNO-19 teste d’autres médicaments et les résultats seront connus dans quelques jours pour certains à quelques semaines pour d’autres.

 

 

 

 

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